Chaque année, durant la période du mercato, journalistes et dirigeants reviennent sans cesse à évoquer le Fair Play Financier (ou FPF). Récemment, les décisions d'interdire les compétitions européennes à l'AC Milan puis de façon plus spectaculaire à l'encontre de Manchester City, rappellent l'importance de ce fameux FPF. Mais le FPF, c'est quoi ? Comment ça fonctionne ? Internazionale.Fr tente de vous expliquer la chose, dans ses grandes lignes.
Présentation générale
Le FPF, c'est avant tout une question européene : l'UEFA a imposé cette règle à ses clubs. Pour ceux qui ne respectent pas la règle, diverses sanctions sont prévues : certaines sont anodines comme des avertissements ou des amendes minimes, mais l'arsenal est intimidant car on a vu l'UEFA aller jusqu'à l'exclusion d'un club aux compétitions qu'elle organise. Des sanctions intermédiaires comme l'exclusion de joueurs à ces compétitions ou des amendes salées existent.
Le but du FPF est de faire en sorte que le football soit financièrement plus sain. L'UEFA menace les clubs qui dépenseraient plus que ce qu'ils ne reçoivent comme recettes. En effet, on a vu de nombreux clubs (notamment espagnols) s'endetter à des conditions parfois délirantes, remettant en cause leur propre existence et mettant en danger l'aspect sportif.
Fonctionnement - Les recettes
Nous avons vu que la règle de base était simple : un club doit gagner plus que ce qu'il ne dépense. Mais tout n'est pas qu'une question d'encaissement ou décaissement. Qu'est-ce qu'une recette, qu'est-ce qu'une dépense ? Pour comprendre, rien de tel que de partir sur de vrais états financiers. Quand vous savez où chercher et que vous n'avez pas peur de l'anglais (ou de l'italien dans notre cas), les informations sont généralement accessibles.
Les recettes dans un club comme le nôtre proviennent principalement de deux sources : les Droits TV et le Sponsoring.
On peut décomposer ces revenus de la façon suivante
Le sponsoring représente quasi la moitié de nos revenus. Finalement, les ventes de maillots sont importants mais ne sont pas la plus grosse source de revenus.
On s'aperçoit que la Ligue des Champions (en bas du tableau) a ramené 51M€ par rapport à l'année précédente. Les Droits TV italien quant à eux sont négociés par la fédération italienne. Le classement en fin d'année et d'autres paramètres permettent de définir combien un club gagnera à cet effet.
Attention, l'Inter Milan a créé une société spécialisée dans la gestion Media et Communication. Par exemple, ici ne sont pas comptées les recettes de la billetterie : le bilan complet est difficile à obtenir car il faut le reconstituer en additionnant plusieurs sociétés. Le but de cet article est de comprendre le FPF, pas de détailler la situation financière de l'Inter. Pour continuer l'explication, le bilan de la Juventus est plus simple à la lecture :
Et des recettes de Droits TV plus importantes que nous, du fait de son parcours en LdC
Ainsi, on constate surtout que de ces recettes sont exclues les augmentations de capital (le cash apporté par ceux qui détiennent le club). Pour respecter le FPF, il faut de vrais revenus càd des revenus qui sont sensés se reproduire d'une année sur l'autre ou qui sont fonction des performances sportives directement.
Le véritable sport pour ceux qui détiennent un club, est donc de maximiser ces revenus. Ainsi, si le sportif définit les droits TV, c'est avec des partenariats solides et juteux que se maximisent les sponsoring. Mais là aussi, s'il suffisait de contracter des gros contrats avec des entreprises appartenant aux dirigeants, ce serait bien trop simple : L'UEFA vérifie que ces contrats soient conclus avec des sociétés qui n'ont rien à avoir avec les dirigeants (ou actionnaire) d'un club. Si c'est le cas (et c'est souvent le cas). L'UEFA vérifie que ces contrats soient conclus à des conditions "normales", càd avec des recettes en lien avec l'impact médiatique du club.
Fonctionnement - Les dépenses
S'il est aisé de comprendre ce qu'est une recette, pour les dépenses c'est un peu plus compliqué. On pense souvent qu'un joueur acheté 30M pèsera pour 30M dans le FPF. C'est faux. Il faut déjà comprendre que le prix du joueur représente généralement 90% de l'opération. Pour un très grand joueur en fin de contrat, les coûts des primes, des intermédiaires et du renouvellement du joueur racheté peuvent ramener le coût du joueur à moins de 50% de l'opération. Dans un cas comme Eriksen, la prolongation de son contrat a certainement coûté plus cher que le rachat des 6 mois de contrats restants à Tottenham.
Ensuite, ce coût n'est pas supporté sur une année. Peu importe que le club paie en 1, 2 ou 3 fois. Ce qui compte, c'est le nombre d'années de contrats qu'elle a acquis. Un joueur acheté 30M avec un contrat de 3 ans pèsera 10M par an dans le bilan du FPF : On parle de l'amortissement du contrat (30M / 3 ans = 10M). Voici un exemple
Au bout de 2 ans de contrat, ce joueur à 30M ne représentera que 10M restant, car nous aurons amorti 2 fois 10M les années précédentes. Ainsi, on parlera de plus-value si le joueur est vendu à plus de 10M, même si le prix de vente est inférieur aux 30M initialement posés.
Le reste des dépenses est très classique, il s'agit du personnel du club, des prestataires qui fournissent des services au club, des impôts et taxes, et parfois des cas un peu plus compliqués de droits à payer aux joueurs ou de joueurs appartenant en partie à des fonds ou des personnes étrangères. Nous ne rentrerons pas dans le détail ici, car la question relève plus du juridique et des tensions entre FIFA/UEFA que de l'aspect réellement financier.
Critiques et aspects positifs
Plusieurs critiques s'élèvent contre le FPF. La première provient des dirigeants de club qui sous couvert de vouloir préserver les clubs, empêche leur sauvetage. En effet, un investisseur ne peut pas venir et injecter de l'argent considéré comme des revenus. S'il le fait et investit massivement dans des joueurs, le club sera dans le rouge pour le FPF car il aura des dépenses, mais pas de vraies recettes. Il risque de se faire exclure des compétitions européennes.
La deuxième critique provient des clubs "moyens" qui reprochent aux "grands" clubs de s'être développés comme ils le souhaitaient, et qu'ensuite une règle vienne freiner les investissements pour eux.
Est-ce un mal pour un bien ? Dans de telles conditions, un club racheté par un milliardaire comme cela a été le cas pour Chelsea ne pourrait plus déréguler le marché comme Chelsea l'a fait. Ou en tout cas pas aussi ouvertement. Les clubs aujourd'hui jouent avec la limite (Juventus avec Jeep, Inter avec Suning) des contrats de sponsoring. Tant que ces contrats ne sont pas des moyens détournés de faire des apports financiers tout va bien, mais si l'UEFA se durcit à ce niveau cela risque d'être compliqué. Manchester City a été épinglé à ce sujet, et l'UEFA leur a reproché de déguiser des recettes qui en réalité n'en étaient pas.
Modifié par Karon
Commentaires recommandés
Rejoindre la conversation
Vous pouvez commenter maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous possédez un compte, connectez-vous.